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Lieu de culte et questions immobilières

La question de l'immobilier cultuel a fait l'objet d'une circulaire du 29 juillet 2011 et tient une place importante dans le droit des cultes. Il ne peut y avoir de liberté de culte s'il n'y a pas libre disposition de locaux adaptés aux célébrations publiques d'un culte.

Les cultes qui étaient peu présents, voire absents, en 1905 se trouvent confrontés à des difficultés importantes, notamment pour l'acquisition de terrain en vue de la construction d'un édifice du culte ou pour la location de locaux pouvant être utilisés comme lieu de culte.

La circulaire NOR/IOC/D/11/21246C du 29 juillet 2011 apporte des précisions sur le droit applicable dans le domaine immobilier cultuel. Nous reprenons ci-après certaines de ces informations.

1 - La propriété des édifices du culte

Il résulte de l'application des articles 12 et 13 de la loi du 9 décembre 1905 une différenciation du régime de propriété des édifices du culte établie selon la date de construction de ces édifices.

Ceux qui, en 1789, ont été constitués « biens de la Nation » lors de la nationalisation des biens du clergé sont la propriété de l'Etat, des départements et des communes. Ils font partie de leur domaine public.

Les édifices des cultes reconnus, construits entre la loi du 18 germinal an X (8 avril 1802) et celle du 9 décembre 1905, étaient la propriété, soit des établissements publics du culte, soit des communes. En vertu du principe selon lequel « la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous », les édifices qui ont été construits pendant cette période aux frais des fidèles sur des terrains communaux ont été intégrés dans le domaine public des communes.

A l'inverse, ceux édifiés sur des terrains appartenant aux établissements publics du culte (menses, fabriques, conseils presbytéraux ou consistoires) étaient la propriété de ces derniers.

La loi de séparation des Eglises et de l'Etat (article 2) a prononcé la dissolution de ces établissements publics et a prescrit le transfert des biens mobiliers et immobiliers (article 4) aux associations cultuelles dont elle définissait les principes constitutifs (articles 18 et 19).

Le culte protestant et le culte israélite ont accepté les principes posés par la loi du 9 décembre 1905. Les édifices du culte appartenant à leurs établissements publics sont donc devenus la propriété des associations cultuelles qu'ils ont mises en place.

En revanche, l'Eglise catholique a refusé la constitution d'associations cultuelles. Ses édifices du culte n'ont donc pas pu être attribués à de telles associations et la grande majorité des églises construites avant 1905 sont devenues la propriété des communes.

Les édifices du culte acquis ou construits après 1905 sont la propriété des seules personnes privées qui les ont acquis ou construits, lesquelles sont généralement des associations cultuelles (ou des associations diocésaines) ou des associations régies par la loi du 1er juillet 1901.

En outre, la propriété de l'édifice emporte non seulement celle des immeubles par destination que sont les meubles fixés à l'édifice (tableaux, stalles, orgues, cloches, statues etc.) mais aussi celle des objets mobiliers qu'il renferme. Si les objets mobiliers garnissant l'édifice du culte avant 1905 appartiennent au propriétaire de l'édifice, ils restent grevés de l'affectation cultuelle, de sorte que la collectivité publique propriétaire ne peut en faire un autre usage que celui réservé à la pratique de la religion.

2 - Le périmètre des édifices du culte et leurs dépendances

En l'absence de dispositions législatives ou réglementaires permettant de dire si un bien immeuble peut être considéré comme un édifice du culte ou une dépendance de cet édifice, c'est par la jurisprudence administrative qu'une doctrine a peu à peu été établie. Le juge a été amené à se prononcer sur la nature d'un bien immobilier et son affectation légale au culte à l'occasion de différents recours portant, par exemple, sur la vente d'un bien considéré comme non détachable d'un édifice du culte ou sur l'attribution d'une subvention pour travaux de réparation ou de conservation d'un bien immobilier considéré comme une dépendance d'un édifice légalement affectée au culte.

Ont ainsi été considérés par le juge comme des dépendances d'un édifice du culte :
- la sacristie qui lui est attenante,
- la chapelle située sous l'abside de l'église,
- les abords immédiats quand ils sont nécessaires à la tranquillité et à la dignité des célébrations ou quand ils ont toujours été eux-mêmes utilisés à des fins cultuelles,
- un calvaire, se trouvant associé à l'exercice du culte lors de processions,
- le mobilier en place (stalles, orgues, etc.) dans les édifices du culte en 1905.

En revanche, les presbytères qui ont été attribués aux communes en application de l'article 14 de la loi du 9 décembre 1905 et des articles 1er et 2 de la loi du 2 janvier 1907 ne sont pas considérés comme des dépendances des édifices affectés au culte et font donc partie du domaine privé communal . Ils peuvent être loués ou aliénés mais ils ne peuvent être mis gratuitement à disposition d'un ministre du culte.

3 - Jouissance gratuite, exclusive et perpétuelle des édifices du culte

En vertu des dispositions de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905 et de l'article 5 de la loi du 2 janvier 1907, l'affectation des édifices servant à l'exercice public du culte, ainsi que les objets mobiliers les garnissant, est gratuite, exclusive et perpétuelle. Il ne peut être mis fin à la jouissance des biens, et, s'il y a lieu, à leur transfert que selon une procédure de désaffectation.

Le caractère perpétuel de l'affectation cultuelle des édifices du culte existant en 1905 concerne les édifices restés ou devenus la propriété d'une personne publique mais aussi les édifices du culte transférés aux associations cultuelles.

Ainsi les associations cultuelles protestantes et israélites qui se sont constituées dans les délais impartis par la loi du 9 décembre 1905 et qui ont reçu l'attribution des biens qui appartenaient aux anciens établissements publics du culte dissous en application de l'article 4 de ladite loi, doivent respecter, en leur qualité d'affectataire, l'affectation cultuelle des édifices dans les mêmes conditions que celles appliquées aux édifices demeurés propriété des personnes publiques. Cette obligation est transmise aux associations cultuelles issues de regroupements d'associations cultuelles attributaires.

Pour l'Eglise catholique, en application des textes susvisés et de ses règles d'organisation propre, l'affectataire est le curé desservant l'église (ou les églises) de la paroisse, nommé par l'évêque du diocèse territorialement compétent et chargé de régler l'usage des lieux de manière à assurer aux fidèles la pratique de leur religion. Ne peut être considéré comme légitime affectataire de l'édifice que le desservant régulièrement nommé par les autorités de son culte et en communion avec la hiérarchie de celui-ci . Par ailleurs, le Conseil d'Etat a jugé que « la loi du 9 décembre 1905 n'a pas rendu aux communes le droit de disposer des églises dont elles sont propriétaires ».

4 - Les prérogatives de l'affectataire

L'affectation cultuelle signifie que l'édifice du culte doit être utilisé à des fins cultuelles et, en premier lieu, aux célébrations du culte. Si la loi du 9 décembre 1905 n'apporte pas d'indication sur la nature précise des activités qui peuvent être conduites dans les édifices du culte, elle prévoit en revanche deux types d'interdictions :
- celle d'y tenir des réunions politiques (article 35-1),
- celle de prononcer un discours ou d'afficher ou distribuer un écrit contenant des propos outrageants ou diffamatoires à l'égard d'un citoyen chargé d'un service public, ou incitant les citoyens à résister à l'exécution des lois ou encore dressant les citoyens les uns contre les autres (articles 34 et 35).
Le ministre du culte (pour les églises catholiques) ou le président de l'association affectataire (pour les autres cultes) est le garant du bon usage de l'édifice conformément à la destination cultuelle qui lui a été donnée par la loi.

Le ministre du culte ou le président de l'association est chargé de la police à l'intérieur de l'édifice dont il a reçu l'affectation. La Cour de cassation a rappelé que le pouvoir de police du ministre du culte n'a pour but que de lui permettre d'assurer l'exercice du culte et, qu'à ce titre, il lui appartient de fixer les horaires des cérémonies religieuses, d'organiser les services religieux et d'en régler la tenue, tout en respectant le libre droit des fidèles de pénétrer dans l'église et de participer au culte.

Le ministre du culte, desservant légitime, a seul autorité dans l'édifice pour procéder aux aménagements intérieurs, notamment en ce qui concerne le mobilier liturgique. S'il s'agit de travaux de restauration, de réparation, de modification, de mise aux normes de sécurité portant sur un édifice du culte classé ou un objet classé, une autorisation de l'autorité administrative compétente est exigée (le préfet ou le ministre chargé de la culture).

Le curé desservant pour l'Eglise catholique, ou le président ou le directeur de l'association cultuelle pour les autres cultes affectataires, détient les clés de l'édifice du culte dont celle permettant l'accès au clocher. Le maire dispose également d'une clé permettant l'accès au clocher.

S'agissant des sonneries de cloches, l'article 27 de la loi du 9 décembre 1905 et les articles 50 et 51 du décret du 16 mars 1906 prévoient que les sonneries de cloches tant civiles que religieuses sont réglées par arrêté municipal ou, en cas de désaccord entre le maire et les responsables religieux, par arrêté préfectoral.

Enfin, le maire ne peut procéder à la fermeture de l'édifice du culte sans porter atteinte au libre exercice du culte, sauf circonstance exceptionnelle justifiant une telle décision notamment lorsque l'édifice menace de s'effondrer . Une telle décision doit être provisoire et ne concerner que certaines parties de l'édifice.

5 - Utilisation des édifices du culte à des fins compatibles avec l'affectation cultuelle

Ces dernières années, le problème s'est souvent posé de l'utilisation des édifices du culte à des fins culturelles (exposition, concerts, visite, etc.).

Si le caractère cultuel de ces édifices est primordial du fait de leur affectation légale, le législateur a néanmoins considéré qu'ils font partie du patrimoine public et que leur intérêt architectural et artistique ainsi que la valeur des objets mobiliers qu'ils contiennent, peuvent conduire à leur classement (article 16 de la loi du 9 décembre 1905). L'article 17 de cette loi et l'article 29 du décret du 16 mars 1906 disposent que les visites des édifices et l'exposition des objets mobiliers classés sont publiques, aux jours et horaires prévus à cet effet par l'affectataire, sous réserve de l'approbation du préfet. L'article 17 de la loi précise que « la visite de ces édifices et l'exposition des objets mobiliers classés ne peuvent donner lieu à aucune taxe ou redevance ».

Les principes énoncés par la circulaire du 29 juillet 2011 ont vocation à inspirer la pratique suivie pour les édifices cultuels appartenant tant à des collectivités territoriales qu'aux associations cultuelles.

6 - La désaffectation des édifices cultuels (construits avant 1905)

L'affectation au culte d'un édifice qui appartenait à une personne publique au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 9 décembre 1905 est perpétuelle, tant que la désaffectation n'a pas été prononcée dans les conditions prévues par l'article 13 de cette loi et quelle que soit l'évolution de la situation patrimoniale de l'édifice.

6.1 Les édifices du culte appartenant aux communes

Une procédure e déconcentration des décisions de désaffectation a été mise en place pour les édifices cultuels communaux. Elle résulte du décret n° 70-220 du 17 mars 1970 qui dispose que les édifices cultuels communaux et les objets mobiliers les garnissant peuvent, dans les cas énoncés du 3ème alinéa au 7ème alinéa de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905, être désaffectés par arrêté préfectoral, à la demande du conseil municipal, sous réserve du consentement écrit de la personne physique ou morale ayant qualité pour représenter le culte affectataire.

Si les conditions de la désaffectation d'un édifice cultuel communal sont réunies, le préfet procède à l'instruction de la demande de désaffectation sur la base d'un dossier réunissant les pièces suivantes :
- le titre de propriété ou l'extrait de la matrice cadastrale,
- le consentement écrit de l'autorité ayant qualité pour représenter le culte affectataire de l'édifice,
- la délibération du conseil municipal de la commune concernée,
- l'avis du directeur régional des affaires culturelles sur le projet de désaffectation accompagné d'un rapport précisant si l'édifice est inscrit ou classé au titre des monuments historique,
- le plan des abords de l'édifice, avec éventuellement des photographies de celui-ci.

6.2 Les édifices du culte appartenant aux associations cultuelles

La désaffectation des édifices du culte, construits avant 1905, appartenant aux associations cultuelles (protestantes et israélites) ne peut être prononcée que si l'association se trouve confrontée à l'une des cinq situations suivantes :
- l'association bénéficiaire est dissoute,
- le culte cesse d'être célébré pendant plus de six mois consécutifs, en dehors des cas de force majeure,
- la conservation de l'édifice ou des objets mobiliers classés est compromise par l'insuffisance d'entretien et après mise en demeure dûment notifiée du conseil municipal ou, à son défaut, du préfet,
- l'association cesse de remplir son objet ou les édifices sont détournés de leur destination,
- l'association ne respecte pas les obligations prescrites à l'article 6 et à l'avant-dernier alinéa de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905 ainsi que celles relatives aux monuments historiques.

Dans le cas de la dissolution d'une association (qui correspond à la première situation), le législateur a réglé le sort des biens affectés. Il est en effet prévu, au paragraphe 2 de l'article 9 de la loi du 9 décembre 1905 qu' « en cas de dissolution d'une association, les biens qui lui ont été dévolus en exécution des articles 4 et 8 de la même loi, seront attribués par décret rendu en Conseil d'Etat à des associations analogues dans la même circonscription ou, à leur défaut, dans les circonscriptions les plus voisines ».

7 - Aliénation, mise à disposition ou transfert de propriété des édifices du culte

7.1 Les édifices du culte appartenant aux communes

Un édifice du culte appartenant au domaine public d'une commune et les objets mobiliers le garnissant ne peuvent être aliénés ou mis à disposition sans désaffectation et déclassement préalables.
Après désaffectation d'un édifice du culte, la commune propriétaire peut décider :
- soit de prendre une décision de déclassement du bien, pour le faire sortir du domaine public communal et entrer dans son domaine privé. Elle pourra alors le gérer selon les règles de droit commun ;
- soit d'attribuer au bien une nouvelle affectation qui le maintienne dans le domaine public communal, mais avec un usage autre que cultuel.

7.2 Les édifices du culte appartenant à une association cultuelle

L'association propriétaire d'un édifice du culte qui était affecté à l'exercice public du culte avant 1905 et qui a fait l'objet d'une désaffectation peut disposer de l'immeuble comme elle l'entend. Cependant, en tant qu'association cultuelle régie par le titre IV de la loi du 9 décembre 1905, elle ne pourra conserver l'immeuble que s'il est « destiné à son administration et à la réunion de ses membres » ou s'il est « strictement nécessaire à l'accomplissement du but qu'elle se propose ».

Pour les édifices du culte qui n'ont pas été affectés à l'exercice public du culte en 1905 et pour ceux qui ont été acquis ou construits après 1905, l'association cultuelle propriétaire peut en disposer comme elle l'entend puisqu'ils ne sont pas grevés de l'affectation cultuelle légale. Il n'y a donc pas de procédure de désaffectation cultuelle. L'association peut les aliéner, les mettre à disposition selon les règles de droit commun.

Selon l'article 17-1 nouveau, de la loi du 9 décembre 1905 : « Sans préjudice de l'article 910 du code civil, l'aliénation d'un local servant habituellement à l'exercice public d'un culte consentie directement ou indirectement à un État étranger, à une personne morale étrangère ou à une personne physique non-résidente en France est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable à l'autorité administrative.
L'autorité administrative peut s'opposer à l'aliénation, après mise en œuvre d'une procédure contradictoire, pour le motif mentionné au III de l'article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905. L'opposition à l'aliénation, formée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, prive celle-ci d'effet.
»

7.3 Possibilité de transfert de compétence à un EPCI

L'article 94 de la loi n°98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a introduit dans la loi du 9 décembre 1905, aux articles 12 et 13, la possibilité d'intervention d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) en matière « d'édifices du culte ».

Un EPCI peut se doter de cette compétence facultative soit lors de sa création, soit à tout moment, en se conformant aux règles fixées par les articles L.5211-5 et L.5211-17 du CGCT. S'il prend cette compétence, il peut :
- soit disposer des biens meubles et immeubles, sans transfert de propriété, dans les conditions prévues aux trois premiers alinéas de l'article L.1321-1 du CGCT,
- soit devenir propriétaire des biens meubles et immeubles en application des dispositions de l'article L.3112-1 du CGPPP.

En cas de transfert de la compétence « Edifices du culte » emportant de plein droit la mise à disposition des édifices du culte, l'article L.1321-1 du CGCT prévoit que « le procès-verbal, établi contradictoirement entre les représentants de la collectivité antérieurement compétente et de la collectivité bénéficiaire ..., précise la consistance, la situation juridique, l'état des biens et l'évaluation de la remise en état de ceux-ci ».

Le Conseil d'Etat a jugé que « la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat n'a pas rendu aux communes le droit de disposer des églises dont elles sont propriétaires » et que la loi « a maintenu, au contraire, en termes exprès, leur affectation à l'exercice du culte ».

En l'absence d'un décret mettant fin à l'affectation cultuelle légale, celle-ci ne saurait être remise en cause à l'occasion d'un transfert de la compétence « Edifices du culte » à un EPCI. Les édifices du culte mis à la disposition d'un EPCI ou dont la propriété a été transférée à un EPCI ne peuvent être désaffectés qu'en respectant les dispositions de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905.

8 - Entretien et réparation des édifices du culte

Si la loi du 9 décembre 1905 pose, en son article 2, le principe de l'interdiction de subventionner les cultes, le législateur a autorisé, dans le texte voté en 1905 puis ultérieurement, des exceptions à cette interdiction. Les articles 13 et 19 de la loi du 9 décembre 1905 autorisent les collectivités publiques à participer financièrement à certains types de travaux (entretien, conservation et réparation) en fonction de l'appartenance des édifices du culte à une personne publique ou à une association cultuelle.

Lorsque les édifices du culte, les objets mobiliers et les orgues sont classés au titre des monuments historiques, tous les travaux et aménagements les concernant sont soumis aux dispositions des articles L.621-9 et L.622-7 du code du patrimoine.

8.1 Les édifices du culte appartenant à une personne publique (art 13 de la loi 1905)

La loi du 13 avril 1908 (article 5) a ajouté un dernier alinéa à l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905, qui permet à l'Etat, aux départements et aux communes d'engager les dépenses nécessaires pour les seuls travaux d'entretien et de conservation des édifices du culte dont la propriété leur a été reconnue par la loi du 9 décembre 1905.

Depuis la loi n°98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, cette possibilité est également offerte aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui ont choisi d'exercer la compétence « Entretien et conservation des édifices du culte ».

Réalisés par la personne publique propriétaire, les travaux d'entretien et de conservation des édifices du culte sont soumis aux règles du code des marchés publics.

Les juges ont notamment admis, au titre des travaux d'entretien et de conservation, les travaux de ravalement, chauffage, éclairage et de peintures.

S'agissant des dépenses d'installation électrique, le Conseil d'Etat a considéré, dans un avis du 11 décembre 1928, que celles-ci peuvent être prises en charge par la collectivité publique propriétaire si elles sont justifiées soit par la conservation de l'édifice et des objets le garnissant, soit par la sécurité des visiteurs.
La même analyse peut être appliquée aux dépenses d'installation de chauffage dès lors le chauffage participe à la conservation de l'édifice.

S'agissant des orgues qui étaient installés dans les édifices du culte avant la mise en vigueur des dispositions de l'article 12 de la loi du 9 décembre 1905, ils sont considérés comme des biens immeubles par destination et sont donc grevés de l'affectation cultuelle comme le sont les édifices dans lesquels ils sont installés. Les travaux d'entretien des orgues, comme ceux effectués sur les cloches, sont assimilés à des travaux de grosses réparations incombant à la commune propriétaire.

Par ailleurs, il n'est pas interdit à une commune d'acquérir et d'installer un orgue dans un édifice du culte lorsque cette opération revêt un caractère d'intérêt public communal .

Lorsque les collectivités publiques refusent d'effectuer des travaux nécessaires sur des édifices leur appartenant ou n'en ont pas les moyens, des offres de concours peuvent être constituées par les fidèles et lesdites collectivités ne peuvent s'y opposer dès lors que les sommes correspondantes ont été réunies . Dans cette hypothèse, les travaux sont entièrement réalisés par la personne publique propriétaire qui en assume la responsabilité compte tenu de leur nature de travaux publics.

8.2 Les édifices du culte appartenant à une association cultuelle ou diocésaine

En application de l'avant-dernier alinéa de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905, les associations affectataires d'édifices du culte sont « tenues des réparations de toute nature, ainsi que des frais d'assurance et autres charges afférentes aux édifices et aux meubles les garnissant ».

Mais, par la loi du 25 décembre 1942, le législateur a ajouté une disposition au dernier alinéa de l'article 19 de la loi du 9 décembre 1905, permettant aux collectivités publiques (Etat, département, communes) de participer aux frais de « réparation des édifices affectés au culte public, qu'ils soient ou non classés monuments historiques » appartenant aux associations cultuelles qui assurent, elles-mêmes, la maîtrise d'ouvrage de ces travaux.

Cette faculté est cependant limitée, d'une part aux seules « associations cultuelles » se conformant aux dispositions des articles 18 à 21 de la loi du 9 décembre 1905 (dont les associations diocésaines), et d'autre part, aux dépenses de « réparations » qui correspondent aux travaux nécessaires à la conservation de l'édifice (maintien hors d'eau, mises en sécurité de l'édifice, etc.).

8.3 Les travaux sur les édifices du culte ou les objets classés ou inscrits

Pour les édifices du culte et objets classés au titre des monuments historiques, tous les travaux de modification, de réparation et de restauration les concernant nécessitent, en vertu des dispositions des articles L.621-9 et L.622-7 du code du patrimoine, l'autorisation préalable de l'autorité administrative compétente (le préfet ou le ministre chargé de la culture). La procédure doit être instruite conformément aux dispositions des articles 19 à 29 du décret n° 2007-487 du 30 mars 2007 relatif aux monuments historiques et aux zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager.

L'article 19 de ce décret énumère, de manière non exhaustive, les travaux pour lesquels une autorisation est obligatoire en précisant toutefois que ne sont pas soumis à autorisation les travaux d'entretien et les réparations courantes.

En vertu des dispositions du décret n° 69-131 du 6 février 1969, les travaux d'entretien et réparation que nécessite la conservation des édifices du culte classés ou inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques peuvent faire l'objet d'une subvention de l'Etat.

En application des dispositions de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (art.99-IV) et du décret n°2005-837 du 20 juillet 2005, les dépenses relatives à la conservation du patrimoine rural non protégé sont désormais prises en charge par les départements et non plus par l'Etat.

8.4 Les aides accordées au titre de l'intérêt général et de l'intérêt public local

Le Conseil d'Etat a jugé que le principe de laïcité n'interdit pas, par lui-même, l'octroi de subvention à des organismes ou à des activités liés aux cultes dès lors que le projet envisagé présente un caractère d'intérêt général ou local, que la subvention n'est pas destinée à l'exercice du culte ou à une association cultuelle et qu'il soit garanti, notamment par voie contractuelle, que la participation de la collectivité est exclusivement affectée au financement du projet.

Dans une décision , concernant l'octroi d'une subvention de la ville de Lyon en vue du financement des travaux de construction d'un ascenseur destiné à faciliter l'accès des personnes à mobilité réduite à la basilique de Fourvière, le Conseil d'Etat a jugé que les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 ne s'opposent pas à ce qu'une collectivité finance ou subventionne des travaux en rapport à un édifice du culte à la triple condition :
- que l'équipement ou l'aménagement envisagé présente un intérêt public local, lié notamment à l'importance de l'édifice pour le rayonnement culturel ou le développement touristique et économique de son territoire ;
- que cet équipement ne soit pas destiné à l'exercice du culte ;
- et que soit garanti, notamment par voie contractuelle, que la participation de la collectivité n'est pas versée à une association cultuelle et qu'elle est exclusivement affectée au financement du projet.

A ces conditions, cet équipement ainsi subventionné peut bénéficier, à titre subsidiaire, aux personnes pratiquant leur culte dans cet édifice.

9 - Mise à disposition d'un espace public pour un usage cultuel

L'article L.2144-3 du code général des collectivités territoriales permet aux collectivités territoriales de mettre les locaux communaux à disposition « d'associations, de syndicats ou de partis politiques qui en font la demande ». Les deuxième et troisième alinéas de cet article précisent les compétences du maire et du conseil municipal pour la mise à disposition de locaux communaux. Il appartient au maire de « déterminer les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public " et au conseil municipal " de fixer, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation ».

L'évolution de la jurisprudence tend à privilégier l'exercice de la liberté de réunion garantie par l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans une ordonnance récente , le Conseil d'Etat a considéré que le refus opposé par le maire à l'association cultuelle en cause pour la location d'une salle communale aux fins d'organiser, pendant une soirée, une manifestation religieuse portait une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de réunion qui est une liberté fondamentale, dès lors que la ville de Lyon ne faisait état d'aucune menace grave à l'ordre public. Il a aussi jugé que le prix acquitté pour cette location ne saurait être regardé comme une subvention (prohibée par l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905) au motif que les tarifs des salles municipales seraient plus avantageux que ceux des salles privées, la ville de Lyon n'ayant pas établi que l'association avait la possibilité de louer une salle privée au jour et aux heures qu'elle avait déterminés.

En application des dispositions de la loi du 9 décembre 1905 et des articles précités du code général des collectivités territoriales, une association cultuelle constituée conformément au titre IV de cette loi peut bénéficier de la mise à disposition de locaux communaux ou d'un espace public pour un usage exclusivement cultuel ou, selon la jurisprudence, pour un usage non cultuel à titre accessoire et occasionnel, sous réserve toutefois que cette mise à disposition ne soit pas consentie à titre gratuit ou dans des conditions préférentielles ou pour une durée indéterminée afin d'éviter qu'elle ne soit assimilée à une aide interdite par l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905.

Cette solution a été confirmée par une décision du Conseil d'Etat . Le Conseil d'Etat rappelle ainsi qu'une commune « ne peut rejeter une demande d'utilisation d'un (...) local [lui appartenant] au seul motif que cette " demande lui est adressée par une association dans le but d'exercer un culte ". Elle peut, à l'inverse, autoriser, dans le respect du principe de neutralité à l'égard des cultes et du principe d'égalité, l'utilisation d'un local qui lui appartient pour l'exercice d'un culte par une association, dès lors que les conditions financières de cette autorisation excluent toute libéralité et, par suite, toute aide à un culte ». Toutefois, cette mise à disposition ne saurait s'opérer « de façon exclusive et pérenne », ce qui aurait pour effet de conférer à ce local le caractère d'édifice cultuel et serait contraire aux dispositions de la loi du 9 décembre 1905.

En vertu de la loi du 2 janvier 1907, une association régie par la loi du 1er juillet 1901 peut demander à utiliser un espace public pour un usage cultuel.

En tout état de cause, la mise à disposition d'un local communal doit respecter le principe d'égalité de traitement entre les associations, syndicats, partis politiques ou autres organismes qui en font la demande, tant dans la décision d'octroi ou de refus qu'en matière de contribution financière fixée pour cette occupation.

S'il s'agit d'un local appartenant au domaine public de la collectivité territoriale, la mise à disposition prend la forme d'une occupation privative du domaine public qui est subordonnée à la délivrance d'une autorisation délivrée par l'autorité compétente (article L.2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP)). L'occupation ne peut être que temporaire et l'autorisation est précaire et révocable à tout moment. (Articles L.2122-2 et L.2122-3 du CGPPP).

Les dispositions de l'article L.2125-1 du CGPPP autorisant la mise à disposition dudit local à titre gratuit lorsque celle-ci ne présente pas un objet commercial ne sont pas applicables aux associations qui souhaiteraient utiliser les locaux à des fins cultuelles, la mise à disposition à titre gratuit ou même préférentiel étant contraire aux dispositions de l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905.

S'il s'agit d'un local appartenant au domaine privé de la collectivité territoriale, son utilisation ou son occupation repose généralement sur un contrat de location de droit privé, sauf si apparaît un critère permettant de le transformer en un contrat administratif (présence de clause exorbitante de droit commun).
Certains établissements publics ou organismes recevant du public (tels que les aéroports) peuvent mettre à disposition du public un local servant de lieu de culte ou de prière. Aucune disposition légale ou réglementaire n'existe sur cette faculté qui reste à la discrétion de leurs dirigeants.

10 - Aumônerie et lieux de culte dans les établissements fermés

10.1 Aumônerie et lieux de culte dans les établissements scolaires

La loi du 28 mars 1882 qui a rendu l'enseignement primaire obligatoire et a supprimé l'enseignement religieux des programmes scolaires a prévu, en son article 2 , que les écoles primaires publiques vaqueront un jour par semaine, en outre du dimanche, afin de permettre aux parents de faire donner, s'ils le désirent, à leurs enfants, l'instruction religieuse en dehors des édifices scolaires.

En 1905, le législateur a introduit une exception au principe d'interdiction de subventionner les cultes en permettant aux collectivités publiques (Etat, départements, communes) de financer « les dépenses relatives à des services d'aumôneries destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que les lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons ».

Dans les écoles primaires, il n'est pas prévu d'aumônerie, l'enseignement religieux étant donné à l'extérieur des locaux scolaires, en dehors des heures de classe et sous la responsabilité des parents.

Dans les établissements publics d'enseignement du second degré, la création d'une aumônerie est liée à l'existence d'une demande émanant des familles. Dans les établissements comportant un internat, l'institution du service d'aumônerie est de droit dès qu'elle a été demandée et un local doit être mis à la disposition de l'aumônier et des élèves inscrits à l'aumônerie. Dans les établissements ne comportant pas d'internat, un service d'aumônerie peut être organisé sur décision du recteur au sein ou à l'extérieur de l'établissement, en fonction du nombre de demandes reçues pour chaque culte et des contraintes de l'établissement. Le conseil d'administration de l'établissement doit fournir au recteur un avis sur les conditions de fonctionnement de l'aumônerie.

Dans les établissements d'enseignement supérieur et les résidences universitaires gérées par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), comme dans tout établissement public ou organisme privé recevant du public, un local peut être mis à disposition des étudiants à des fins cultuelles, sans qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'existe sur cette faculté. Dans l'ordonnance de référé liberté du 6 mai 2008 , le Conseil d'Etat a constaté l'absence de disposition législative et réglementaire spécifique à la pratique des cultes dans les résidences universitaires et a considéré que la fermeture d'une salle utilisée par les étudiants à des fins cultuelles n'a porté aucune atteinte manifestement illégale aux libertés fondamentales de culte et de réunion.

10.2 Aumônerie dans les établissements hospitaliers, militaires et pénitentiaires

Sur le fondement des articles 1er et 2 de la loi du 9 décembre 1905, des services d'aumônerie sont organisés dans les établissements de santé, les maisons de retraite, les établissements pénitentiaires et les casernes ou campements militaires aux fins de permettre aux personnes qui y vivent de pouvoir exercer leur culte librement. La liste de ces établissements n'est pas exhaustive. Le service d'aumônerie et les cérémonies cultuelles y sont organisés soit dans un édifice du culte existant au sein de l'établissement, soit dans une salle polyvalente mise à la disposition à cet effet.
En l'absence de disposition spécifique sur les modalités de financement des lieux de culte nécessaires au fonctionnement de ces services d'aumônerie, ce sont les dispositions du deuxième alinéa de l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 qui s'appliquent. Les dépenses d'investissement et de fonctionnement des lieux de culte ou locaux mis à la disposition des services d'aumônerie sont à la charge des établissements avec la participation éventuelle des collectivités publiques.

11 Construction des édifices du culte

11.1 Les règles d'urbanisme

Pour la construction des lieux de cultes, les associations se heurtent à un certain nombre de difficultés, d'une part pour l'acquisition du terrain destiné à la construction de l'édifice et d'autre part pour la construction de l'édifice. Le projet doit satisfaire aux règles générales d'urbanisme, aux dispositions législatives et réglementaires concernant les plans locaux d'urbanisme et les règles de sécurité et de lutte contre l'incendie dans les établissements recevant du public .

Si une commune peut, par délibération, instituer un droit de préemption urbain sur tout ou partie des zones urbaines et des zones d'urbanisation future, elle ne peut exercer ce droit que dans certaines conditions. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé et être suffisamment motivée. Ainsi le juge administratif et le juge judiciaire ont annulé à plusieurs reprises des décisions de préemption en raison du défaut ou de l'insuffisance de motivation.

En revanche, certains projets de construction de lieux de culte n'ont pu voir le jour ou ont été retardés car ils ne respectaient pas certaines dispositions du règlement ou des annexes du plan local d'urbanisme. Ainsi, la méconnaissance de la destination d'un terrain classé, l'insuffisance de places de parking ou la trop grande hauteur des immeubles sont autant de cas dans lesquels le permis de construire peut être refusé à bon droit.

Le maire, seul qualifié pour délivrer le permis de construire déposé pour la construction d'un édifice du culte, ne peut assortir sa décision de considérations étrangères aux règles d'urbanisme, sinon il commettrait un détournement de pouvoir sanctionné comme tel par les juridictions administratives saisies de la légalité de son refus.

Selon l'article 422-5-1 du code de l'urbanisme « Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis du représentant de l'Etat dans le département si le projet porte sur des constructions et installations destinées à l'exercice d'un culte. »

En complément, lisez l'article « Lieu de culte, question immobilière et droit de préemption ».

11.2 Les aides à la construction des lieux de culte

11.2.1 Les garanties d'emprunt

En vertu des dispositions des articles L.2252-4 et L.3231-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT), les communes et départements « peuvent garantir les emprunts contractés pour financer, la construction, par des associations cultuelles ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par des établissements publics du culte ou par des associations inscrites de droit local à objet cultuel, d'édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux ».

La notion « d'agglomération en voie de développement » doit être comprise comme étant une zone urbanisée dont la population augmente de manière significative.

11.2.2 Les baux emphytéotiques

Il est possible de recourir, en vue de la construction d'un édifice du culte ouvert au public, au bail emphytéotique (non administratif) prévu par l'article L. 451-1 du code rural. Dans ce cas, le bail ne peut porter que sur un bien appartenant au domaine privé de la collectivité territoriale propriétaire. C'est ce type de bail qui a été utilisé à partir des années 1930 pour la construction d'édifices du culte sans contrevenir au principe de laïcité fixé par l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat.

Afin de rendre possible la conclusion d'un bail emphytéotique en vue de la construction d'un édifice du culte sur un terrain appartenant au domaine public d'une collectivité territoriale, le législateur a complété l'article L. 1311-2 du CGCT.

Désormais, « un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet d'un bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-1 du code rural, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence ou en vue de l'affectation à une association cultuelle d'un édifice du culte ouvert au public ». Ce bail, dénommé « bail emphytéotique administratif » (BEA), peut porter sur un bien relevant du domaine privé ou public de la collectivité territoriale propriétaire, à condition que ce bien soit hors du champ d'application de la contravention de voirie, c'est-à-dire que ce bien ne fasse pas partie de la voirie terrestre. Selon les termes de l'article L. 1311-2 du CGCT, un BEA ne peut être accordé, pour un édifice du culte ouvert au public, qu'aux seules associations cultuelles régies par la loi du 9 décembre 1905. La collectivité territoriale doit informer le représentant de l'Etat dans le département de son intention de conclure un tel bail au moins trois mois avant sa conclusion.

Le Conseil d'Etat a précisé le régime juridique de ce dispositif législatif créé par le législateur en 2006. Le Conseil juge ainsi que « l'ordonnance précitée du 21 avril 2006, a ouvert aux collectivités territoriales la faculté, dans le respect du principe de neutralité à l'égard des cultes et du principe d'égalité, d'autoriser un organisme qui entend construire un édifice du culte ouvert au public à occuper pour une longue durée une dépendance de leur domaine privé ou de leur domaine public, dans le cadre d'un bail emphytéotique, dénommé bail emphytéotique administratif (...) avec pour contreparties, d'une part, le versement, par l'emphytéote, d'une redevance qui, eu égard à la nature du contrat et au fait que son titulaire n'exerce aucune activité à but lucratif, ne dépasse pas, en principe, un montant modique, d'autre part, l'incorporation dans leur patrimoine, à l'expiration du bail, de l'édifice construit, dont elles n'auront pas supporté les charges de conception, de construction, d'entretien ou de conservation ».

Le Conseil d'Etat juge, ce faisant, que le législateur a « dérogé aux dispositions (...) de la loi du 9 décembre 1905 » et que, sous réserve du respect du principe de neutralité et du principe d'égalité, il est possible, sous le contrôle du juge administratif, d'utiliser ce dispositif même avec une redevance modique.

12 - La sécurité et la sûreté dans les édifices du culte

12.1 La réglementation des ERP et la responsabilité des propriétaires et des affectataires

Les édifices du culte ouverts au public sont des établissements recevant du public (ERP) au sens de l'article R*123-2 du code de la construction et de l'habitation. Ils doivent à ce titre satisfaire aux règles générales régissant les établissements recevant du public telles que définies aux articles L.123-1 à L.123-4 et R.123-1 à R.123-55 du code de la construction et de l'habitation. Il est parfois difficile, voire impossible de trouver une solution permettant de rendre l'édifice conforme aux normes de sécurité en raison de sa construction très ancienne. Si une tolérance est admise, il paraît néanmoins utile de rappeler aux maires et aux présidents d'association cultuelle que leur responsabilité peut être engagée si un accident se produit par défaut d'entretien de l'édifice du culte .

Pour les monuments historiques protégés appartenant à l'Etat, c'est l'architecte des bâtiments de France, conservateur du monument, qui est le référent en matière de sécurité pour tous les travaux et aménagements divers ainsi que pour toutes les manifestations ayant lieu dans l'édifice. C'est lui qui délivre un avis sur le respect des normes de sécurité. Il est le responsable unique de la sécurité mais chaque exploitant ou utilisateur est considéré comme responsable de la sécurité pour l'activité qu'il organise sous l'autorité du conservateur.

L'arrêté interministériel du 15 septembre 2006 (JO du 28 septembre 2006) relatif à la protection contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public relevant du ministère chargé de la culture et la circulaire n° 2008-002 du 21 avril 2008 relative à l'utilisation à des fins non cultuelles des édifices du culte appartenant à l'Etat précisent ces dispositions.

Pour les monuments historiques protégés n'appartenant pas à l'Etat, il appartient au propriétaire (le maire ou le président de l'association cultuelle concerné) de consulter la commission de sécurité compétente. Si l'état d'un édifice classé nécessite des travaux de mise aux normes de sécurité, une demande d'autorisation doit être adressée à la direction régionale des affaires culturelles territorialement compétente.

Le respect des conditions de sécurité ou de prévention du risque d'incendie ne doit pas avoir pour conséquence de limiter ou d'interdire l'exercice du culte. Ainsi le Conseil d'Etat a considéré dans son arrêt du 14 mai 1982, Association internationale pour la conscience de Krishna, que « s'il appartenait au préfet de police d'interdire les manifestations et réunions publiques dans des locaux impropres à cet usage et s 'il avait également le pouvoir de veiller, par des mesures appropriées, au respect de la tranquillité publique par les adeptes du culte krisnaïte, il ne pouvait, sans porter une atteinte illégale à la liberté des cultes, interdire toute cérémonie et tout office religieux organisés dans l'ancien hôtel d'Argenson... ».

S'agissant des ministres du culte qui assurent la police des cultes à l'intérieur des édifices du culte, ils ont l'obligation de respecter le libre droit des fidèles de pénétrer dans l'édifice du culte et de participer aux cérémonies mais ils ont le droit de faire expulser des perturbateurs. Ils n'ont pas d'obligation de sécurité qui tendrait à les assimiler à l'exploitant d'un lieu ouvert au public ou à une collectivité publique administrant un bien du domaine public. Ainsi un curé desservant n'est pas tenu responsable d'une chute d'une personne à l'intérieur de l'église.

En revanche, la responsabilité du ministre du culte peut être engagée si le propriétaire de l'édifice établit à son encontre que le dommage tel que la détérioration ou la destruction de l'édifice du culte, a été causé par une faute, une négligence ou une imprudence qui lui est imputable . Ainsi, la plus grande prudence doit être recommandée aux ministres du culte, d'une part sur les risques d'incendie dû au mauvais positionnement des bougies ou aux feux allumés trop près de l'édifice, et d'autre part sur les risques d'intoxication au monoxyde de carbone due au mode de chauffage défectueux.

Dans le cadre de manifestations organisées dans les édifices du culte, il appartient aux organisateurs de veiller à ce que leurs activités soient conformes aux prescriptions générales de sécurité de l'édifice. A cet effet, il est vivement conseillé d'établir, pour tout édifice du culte, un règlement interne de sécurité élaboré de manière concertée entre le propriétaire et, le cas échéant, l'affectataire, faisant ensuite l'objet d'une acceptation expresse par l'organisateur. En cas de sinistre, un tel document peut être utilement produit auprès de l'assureur car il est de nature à clarifier les responsabilités de chacune des parties.

12.2 La souscription de polices d'assurance

L'avant dernier alinéa de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905 prévoit que les associations qui ont été attributaires d'un édifice du culte en 1905 « sont tenues des réparations de toute nature ainsi que des frais d'assurance et autres charges afférentes aux édifices et aux meubles les garnissant ». La loi du 13 avril 1908 a complété l'article 13 de la loi de 1905 par une disposition qui donne la possibilité aux collectivités publiques (Etat, département et communes) d'engager les dépenses nécessaires pour l'entretien et la conservation des édifices du culte dont la propriété leur est reconnue par la loi.

Au vu des responsabilités que les collectivités publiques ou les associations encourent en qualité de propriétaires d'un ou de plusieurs édifices du culte et des risques de se voir exposer à des frais importants en cas de sinistre, il est indispensable qu'elles souscrivent, d'une part un contrat d'assurance couvrant les dommages concernant les bâtiments et les biens mobiliers qu'ils contiennent (incendie, dégâts des eaux, bris de glace, vol, vandalisme, catastrophes naturelles, etc. ), et d'autre part une police de responsabilité civile pour les dommages éventuels pouvant atteindre des tiers et leurs biens.

Si l'association est locataire des bâtiments ou locaux utilisés pour l'exercice du culte, elle doit souscrire une police sur ses " risques locatifs " qui permet de couvrir les dommages susceptibles de concerner les biens immobiliers et mobiliers qu'elle loue mais aussi ceux pouvant toucher des tiers ou leurs biens.

© 2007-2022 Alain LEDAIN - Gérard HUNG CHEI TUI
Cet article est tiré du livre "Le culte et la législation" Edition 2021

 

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